J.-P. Lingelser, Le portail central de la cathédrale : une nouvelle lecture iconographique

La Société des Amis de la cathédrale et la Fondation de l’Œuvre Notre-Dame ont donné mercredi 14 septembre la première conférence de leur nouvelle saison. Ce fut un franc succès tant par le public venu très nombreux que par la prestation du conférencier. M. Jean-Paul Lingelser, président honoraire de la Société, a en effet proposé une nouvelle approche iconographique du portail central de la cathédrale.

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Simon de Cyrène ou un Dominicain ?

Que retenir d’une conférence aussi riche et dense ?

La présence du monde païen est très forte sur le tympan, a-t-il été souligné. Adam et Eve sortant des enfers seraient ainsi également un avatar du mythe d’Orphée et d’Eurydice. Parmi les prophètes qui font une haie d’honneur de part et d’autre du trumeau, le conférencier voit en le jeune homme imberbe ni maître Erwin, ni David ni Salomon, mais le poète Virgile. Le Moyen Âge considérait ce dernier comme un prophète du monde profane qui a annoncé la venue d’un nouvel âge d’or. Dès lors, très logiquement, M. Lingelser voit dans une figure féminine la sibylle de Cumes qui passe pour avoir promis la venue d’un sauveur au monde païen. Tout aussi logique est la présence d’Aristote sur le tympan : il s’agissait de montrer la convergence entre la philosophie antique et la pensée chrétienne.

Pour comprendre cette présence de l’Antiquité, il faut, a expliqué M. Lingelser, penser aux Dominicains dont le siège était tout proche de la cathédrale et dont il voit deux figurations sur le tympan. A la fois dans l’homme qui vu de dos touche la croix (et qui ne serait donc pas Simon de Cyrène) et dans la présence de Marie-Madeleine, patronne des Dominicains au demeurant. Leur rôle était alors grand dans le combat mené contre la dissolution des mœurs médiévales. Ainsi s’expliquerait la figuration non d’un Christ de gloire comme c’est le cas dans d’autres cathédrales, mais d’un Christ de souffrance. Son regard tourné vers les spectateurs veut en effet susciter la compassion, conformément aux ouvrages de dévotion chers aux Dominicains. Se servant de belles photos, puisant dans l’Histoire et dans la théologie comme dans la pensée populaire, M. Lingelser a revisité de nombreuses autres scènes. Certaines lectures ont d’ailleurs interpellé l’auditoire, suscitant un débat qui à son tour a proposé d’autres pistes de lecture. On l’aura compris : l’interprétation des sculptures ornant le portail central a encore de beaux jours devant elle.

Francis Klakocer

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