Le jeudi 12 septembre 25 membres ont assisté à la visite-conférence du palais Rohan, donnée par la médiatrice culturelle Anna Hihn. Il s’agissait de saisir le bâtiment dans son histoire, son architecture et ses sculptures.
D’une voix posée et forte, la conférencière a commencé par un historique bienvenu. Rappelant que le palais a été édifié par le prince-évêque Armand-Gaston de Rohan-Soubise, sur d’anciennes maisons qui appartenaient à l’évêché comme à des particuliers, elle a posé dates et noms. Commencé en 1732, l’ensemble fut achevé dix ans plus tard, en un temps record pourrait-on dire, eu égard aux techniques d’alors.
Pour signifier l’appartenance de l’Alsace à la France, on a non seulement recouru aux services de l’architecte Robert de Cotte, Premier architecte du Roi, mais surtout on a pratiqué le style classique, nouveauté dans notre ville. La symétrie parfaite de sa façade principale, l’alternance régulière de figures masculines et féminines dans les mascarons, l’utilisation de l’ardoise en lieu et place des tuiles cuites, voilà autant d’éléments qui relèvent de l’art français. La présence de bustes d’empereurs romains, de colonnes cannelées s’achevant en des chapiteaux ioniens et corinthiens, d’un fronton conçu à l’image des temples antiques, tout y renvoie au grand style par lequel on cherchait à se magnifier.
La religion y a bien sûr sa place. Cela se perçoit depuis l’extérieur où l’on reconnaît d’emblée une grande sculpture qui représente la religion sous la forme d’une femme portant la croix. Plus difficile à voir, à la gauche de cette dernière, un des nombreux angelots qui ornementent la façade principale tient dans sa main une flamme. Rapport avec la religion ? Lors de la Révolution, la flamme a remplacé le calice que tenait ostensiblement notre putto. Si de nombreux éléments rendent hommage au Roi Soleil, le commanditaire, mû par la vanité d’appartenir à une illustre ascendance, n’a pas manqué de placer ses armes bien en vue. Et de rappeler aussi sa fonction par de petits détails, à l’image de la crosse épiscopale qui se dégage dans un ensemble sculpté. Que l’étage noble soit situé au rez-de-chaussée dans la cour et non au premier étage, s’explique par la pente naturelle qui s’incline vers l’Ill. Vu depuis cet affluent du Rhin, le rez-de-chaussée redevient ainsi l’étage noble.
Inspiré par le goût français, la façade arrière donne sur une terrasse qui crée l’illusion d’un jardin par la distance établie avec les belles demeures de l’autre côté de l’eau. Si elle y semble moins symétrique, cela provient de l’ajout de la partie gauche qui contient la bibliothèque dans laquelle une porte dérobée donne accès à la pièce qui servait au secrétaire ; la bibliothèque elle-même se prolonge par la chapelle dont les portes ouvertes créent un espace qui fait de cette salle une nef d’église. De ce côté aussi, le grès rose est employé dans les parties secondaires, réservées alors au personnel, tandis que le reste recourt à un grès plus clair évoquant la pierre utilisée à Versailles. Le fer forgé des balcons est relevé par les armoiries dorées du propriétaire des lieux dont l’humilité n’était pas le souci principal…
Et la visite de prendre fin par un jeu de devinettes où il s’agissait d’identifier les figures mythologiques ou encore les quatre saisons grâce à des éléments précis parant les mascarons. Voilà qui a animé une visite menée de bout en bout de main de maître par notre guide dont il convient de saluer la performance.
Francis Klakocer. Remerciements à Anna Hihn pour sa relecture.
Ill. : Roland Moeglin. Plus de photographies.