Anne-Christine Brehm, L’architecte Friedrich Weinbrenner et la cathédrale de Strasbourg

Le mercredi 12 février, au Münsterhof, l’architecte Anne-Christine Brehm de Karlsruhe a proposé une conférence, en langue allemande, sur un sujet a priori étonnant : le rôle que l’architecte badois Friedrich Weinbrenner 1766-1826), connu pour ces réalisations en pur style néo-classique, aurait selon lui joué dans la conservation de la cathédrale.

Friedrich Weinbrenner (1766-1826)

Les agissements des révolutionnaires français, surtout à partir de 1793, puis l’instauration du culte décadaire qui transforme les cathédrales en « temples de la Raison » entraînent à Strasbourg la destruction de nombreuses statues et le remplacement de la croix sur la flèche par un bonnet phrygien en tôle. Mais il était aussi prévu de construire à l’intérieur de la cathédrale un énorme hémicycle de gradins. De retour d’un long séjour d’études en Italie (1792-1797), Weinbrenner est alors citoyen de Strasbourg par suite de son mariage avec sa cousine, fille de l’architecte de la ville Philippe Arnold. Il plaide pour une solution plus respectueuse du monument considéré comme historique et digne d’être préservé, et dessine un projet d’hémicycle en bois, finalement accepté. Les travaux sont vite interrompus, la « mode jacobine » étant passée, mais Weinbrenner demeure très fier de cette action de sauvegarde. Il est d’ailleurs l’auteur de la première loi de protection des monuments historiques en langue allemands (il était inspecteur général des bâtiments en pays de Bade).

Pour Weinbrenner, les bâtiments gothiques ne suscitent pas l’admiration, ils ne sont pas beaux, mais ils contiennent des « germes » de l’art. Il admire la cathédrale de Strasbourg en particulier pour son effet d’ensemble, pour l’espace intérieur, mais aussi pour des raisons pratiques : les nombreuses coursives et galeries partout sur le bâtiment permettent des passages de contrôle et facilitent l’entretien et les réparations en continu. Une autre prise de position par rapport à un sujet délicat à l’époque mérite l’attention : il considère que les supposés « styles nationaux » n’existent pas, que le gothique connait des particularités et des évolutions régionales partout en Europe entre le 12e et le 15e siècle, et qu’il serait mal venu de donner la priorité à une « nation ».

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